Maureen & Æmilia : récit d'un accouchement physiologique - Partie 2
Maureen nous a raconté comment elle a vécu sa grossesse. Dans cette 2ème partie, nous vivons avec elle son accouchement. Un accouchement incroyable qui m’a ému aux larmes. Maureen a utilisé tous les outils qu’elle a appris pour rester sereine même dans les moments les plus intenses. Accompagnée de Baptiste, son compagnon, elle met au monde Æmilia, un bébé qui arrive en douceur… Bonne lecture…
Découvrez ou redécouvrez la première partie de l’histoire de Maureen dans notre article Partie 1 !
Un accouchement incroyablement serein, une émotion intense
En prenant connaissance de mon dossier, Kim a lu le projet de naissance que j’avais rédigé
Nous avons mis environ une heure pour arriver à la maternité. Nous avons passé le trajet en musique, à chanter, à sourire, à tenter de comprendre ce qu’il était en train de se préparer ! Et moi à me dandiner lorsque je sentais ces petites vagues aller et venir dans mon utérus.
La sage-femme qui nous a accueilli s’appelait Kim, un petit bout de femme qui m’avait l’air douce et accueillante. Et chose assez drôle, il se trouve que cette sage-femme s’est occupée de ma collègue quatre ans auparavant ! Elle nous a installé dans une salle, a examiné mon col … j’étais à 2cm … Sur le coup, j’étais un peu frustrée d’être encore si loin du but, et puis j’ai pris la chose de façon positive, c’était du temps en plus passé avec mon bébé rien que pour moi ! En prenant connaissance de mon dossier, Kim a lu le projet de naissance que j’avais rédigé. Bien que ce document n’ait aucune valeur juridique, c’était une façon pour moi d’avoir un appui, un garant, un porte-parole de mes souhaits, désirs et besoins. J’y ai noté mon souhait d’accoucher sans péri, avec le moins d’interventions possibles si elles ne sont pas nécessaires (injection d’ocytocine, poussées dirigées, épisiotomie), d’être actrice de mon accouchement, et qu’aucun « soin » ne soient pratiquer sur le bébé à la naissance (comme l’aspiration) s’ils ne présentent aucune réelle nécessité. Je souhaitais passer les premières heures de vie de mon bébé en peau à peau et faire la tétée de bienvenue, souhaitant l’allaiter par la suite. J’avais d’ailleurs rencontré la sage-femme cadre en fin de grossesse pour échanger avec elle sur ce projet. Elle m’a expliqué qu’il était totalement compatible avec le protocole en vigueur de l’hôpital. Il n’y avait qu’un point qui ne pourrait être respecté, à savoir la pause d’un cathéter juste avant la délivrance, au cas où il y ait besoin d’injecter un produit en urgence, mais qu’il était tout à fait possible de poser le cathéter sans le relier. Cette demande était surtout motivée par ma phobie des aiguilles. Voyant que j’avais été entendu et ma phobie prise en compte, j’avais fait un travail de visualisation pour me préparer à cette petite épreuve que cela représentait pour moi (en vérité, c’était la seule chose qui m’angoissait dans tout le processus de l’accouchement). La sage-femme cadre m’a même proposé de rencontrer une des anesthésistes de l’équipe pratiquant l’hypnose pour m’accompagner dans la gestion de cette phobie. Je n’ai pas eu le temps de la rencontrer, ma fille aillant décidé d’arriver avant … (l’anesthésiste, très prévenante et avec qui j’ai pu avoir des échanges de mail, m’avait fait parvenir des documents sur l’autohypnose et m’a permis de m’exprimer sur ma phobie. Par ces échanges et ma volonté de surmonté cette peur, j’ai travaillé sur cette dernière par le biais de visualisations).
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Nous avons rencontré un collègue de Baptiste qui partait au travail, nous sommes allés sur le marché
A la suite de la lecture de mon projet de naissance, Kim m’a tout de suite parlé de la salle de naissance avec la baignoire. Elle m’a dit qu’une maman l’occupait déjà et était en train d’accoucher mais en fonction de mon souhait et de l’avancement de mon travail, il serait peut-être possible d’y avoir accès. J’ai répondu à Kim que je serais ravie de pouvoir bénéficier de la baignoire si j’en avais la possibilité (Kim nous a tenu informée tout au long du travail de l’avancement de la disponibilité de la salle). Après ce premier check-up, elle nous a proposé d’aller marcher en dehors de l’hôpital et de revenir d’ici 2h pour contrôler de nouveau. Nous nous sommes promenés dans les rues, nous avons rencontré un collègue de Baptiste qui partait au travail, nous sommes allés sur le marché, où Baptiste a acheté quatre muffins, et une protection pour son téléphone. Et moi ? Moi, je profitais du moment présent. Tout était si doux, j’étais dans une autre dimension…
Retour à l’hôpital, j’étais à un bon 2cm avec un col bien effacé. Après un petit monitoring, la sage-femme nous propose de refaire un tour. J’ai préféré me reposer et tenter de dormir un peu avant d’y aller. « Vous allez réussir à dormir là ? » m’a-t-elle demandé d’un air agréablement surpris. Les vagues étaient présentes mais pas assez pour m’empêcher de prendre du repos. J’ai comaté un peu, puis nous sommes retournés faire un tour. Nous avons trouvé un petit parc sur notre chemin. Nous avons parlé, je nous sentais désireux d’accueillir la suite mais calmes et sereins, simplement dans le moment présent. J’acceptais que mon travail avance doucement. Si c’était le temps dont avait besoin notre bébé pour cheminer, alors ça me semblait juste de lui laisser ce temps et de l’accompagner en respectant son rythme.
Au retour de notre promenade, nouveau check-up. Mon travail progressait lentement mais surement. Je devais être dilatée à 3. La sage-femme nous a laissé le champ libre pour une nouvelle balade et aller manger un morceau. Les vagues étant plus présentes, me demandant de me stopper pour les accompagner lorsque je marchais, je risquais de ne plus aller bien vite pour marcher. J’ai préféré laisser Baptiste partir en quête du repas et rester dans ma bulle. Kim m’avait préconisé de manger quelque chose qui ne soit pas trop gras ou trop lourd sur l’estomac, afin que mon repas ne risque pas d’être renvoyé dû à la pression des contractions en fin de travail. Baptiste a donc opté pour une petite quiche aux légumes prise à la boulangerie et pour lui … un mcdo (le light n’était pas de mise pour lui !)
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Faut que je filme pour montrer aux collègues, sinon ils ne me croiront pas
En attendant Baptiste et notre repas, je sentais que les vagues se faisait plus houleuses. J’ai tenté plusieurs positions. Moi qui avais pensé à me mettre à quatre pattes pour accoucher, j’ai voulu tenter cette position à ce moment-là pour m’accompagner dans mon travail. Il y avait une grosse poire juste à côté du lit, sur laquelle je me suis installée. Mais ouille ! Cette position ne m’était en fait pas du tout agréable… Et me faisait ressentir les contractions dans les reins. Baptiste arriva peu après. Je me suis donc réinstallée sur le lit, assise, et nous avons mangé avec appétit. Il devait être aux alentours de 14h.
Peu après notre repas, la sage-femme vint nous voir pour nous expliquer que la salle où nous sommes installés est la salle de naissance la plus proche du bloc, en cas de césarienne. Elle nous a demandé si nous accepterions de laisser la salle à une maman qui présentait un fort risque de césarienne. Nous avons bien sûr laissé la salle. Nous avons pu nous installer dans une salle commune, en attendant que la salle de naissance avec la baignoire soit prête (le temps pour l’équipe de s’occuper d’installer le couple qui l’occupait dans leur chambre et de pouvoir nettoyer la salle). Dans cette salle commune étaient mis à disposition des poires, des ballons que nous pouvions utiliser sur place ou emmener dans notre chambre. Il y avait également deux banquettes. Baptiste s’allongea sur l’une d’elle pendant que je m’installais sur un ballon. Je pense que nous avons dû passer environ une bonne heure dans cette salle. Pendant ce temps, Baptiste qui avait ramené une mangue en profita pour la découper, en a proposé à une professionnelle qui passa, et moi … je dansais mon bébé. Je dansais au rythme de la musique mais surtout au rythme des vagues qui faisait voguer mon utérus. Lorsque je sentais une contraction, je me mettais à faire des tremblements afin de m’aider à rester le plus décontractée possible. J’ai fait beaucoup de mouvements de huit avec le bassin. Baptiste m’a filmé en me disant « Faut que je filme pour montrer aux collègues, sinon ils ne me croiront pas quand je vais leur dire que tu danses pendant tes contractions ! ». Après ce petit temps de danse, j’ai regagné mon ballon. Puis j’ai commencé à sentir que les vagues gagnaient en intensité. Je commençais à les sentir progressivement dans les reins et dans le pelvis. Je me suis mise à genoux, les bras et la tête reposant sur le ballon, pour continuer à me bercer et me mettre dans ma bulle. Il me semble que mon chéri m’a fait des points de pression à cet instant, pour m’accompagner dans mon travail. Puis je lui ai demandé d’aller voir où ça en était pour la salle avec baignoire. Il est allé quérir une sage-femme et est revenu quelques minutes plus tard, qui m’ont paru être une éternité sur le moment, du fait de l’intensité qui commençait à envahir mon bassin.
C’était si intense … et si … je n’y arrivais pas ? … Le mot péridural m’ai apparu
Nous avons pu nous installer dans la salle de naissance avec la baignoire. Kim a d’abord examiné mon col. J’était dilatée à 5. Elle a posé un monito puis nous a laissé. Elle est revenue plus vite, voyant que les contractions commençaient à s’intensifier, et ça tombait bien car la position allongée devenait vraiment inconfortable. J’avais besoin de chaleur, de liberté de mouvement, de verticalité. Elle a commencé à remplir la baignoire et m’a installé un monito portatif. Je me suis déshabillée entièrement, et j’ai regagné le bain et la chaleur de l’eau avec reconnaissance. Je me suis installée à genoux, les mains posées à plat sur le fond de la baignoire. Baptiste m’arrosait le dos avec l’eau chaude. Ça faisait un bien fou… Je lui ai demandé de mettre de la musique. J’avais amené mon mp3 et notre petite enceinte portable. Le temps de trouver la musique qui me correspondait à ce moment-là et c’était parti !
J’ai passé une heure dans la baignoire. Une heure durant laquelle je parlais à mon bébé. Je l’encourageais à continuer de descendre. Pendant les vagues, de plus en plus puissantes et intenses je lui disais « Oui, vas-y ! Continue, c’est bien ! », « Descends mon bébé ! ». Des phrases que je disais tant pour elle que pour moi. Je me sentais sauvage, en pleine expansion. Ma perception s’arrêtait au contour de la baignoire. En dehors de ma fille et moi, de l’eau, de la baignoire, de la musique et des interventions de Baptiste, il n’y avait rien d’autre. J’oscillais entre plusieurs positions. Un coup accroupi, à quatre pattes, à genoux, puis à moitié assise, le dos calé contre la paroi de la baignoire, les jambes en grenouille, comme si j’étais accroupie. Je me souviens avoir eu une contraction tellement intense que j’ai saisi le bras de Baptiste à la volée, l’ai serré très fort et mordu. Des vocalises rauques sortaient de ma gorge, accompagnant ces vagues lancinantes. J’ai senti m’envahir un doute … C’était si intense … et si … je n’y arrivais pas ? … Le mot péridural m’ai apparu. Je l’ai vite repoussé. NON. J’étais simplement dans ce que l’on appelle la phase de désespérance. Baptiste était là, tout entier pour moi, pour nous. J’avais tout son soutien et c’était précieux. Il avait confiance en moi, et au tréfond de moi je savais que j’en étais capable. Je me sentais louve, je me sentais puissante. J’avais juste été surprise par cette puissance transcendante. Je devais chercher la décontraction et accepter ces sensations.
Vous allez devoir sortir avant que la poche des eaux ne se … [ploc !]
Kim est arrivée. Elle avait vu sur le monito que les contractions pulsaient et s’étaient intensifiées. Elle m’examina : « Vous êtes à 9 ! Vous allez devoir sortir avant que la poche des eaux ne se … [ploc !] … ah trop tard ! Bon bah vous êtes à 10 ! ». J’ai senti le « ploc » de la poche des eaux qui se rompait. A peine la phrase de Kim terminée, j’ai ressenti une envie irrémédiable de poussée. Kim m’a dit d’écouter cette envie, de pousser ! Et qu’il me faudrait sortir de la baignoire dès que je le pourrais, entre deux contractions. J’ai accueilli une autre poussée reflexe puis j’ai commencé à me redresser et je suis sortie. Kim avait installé une serviette par terre pour éviter toute glissade. Elle m’a enveloppé dans un drap, que je puisse garder de ma chaleur. Baptiste était près de moi. On rigolait, on plaisantait tous les trois. L’ambiance était calme et festive en même temps. J’ai gagné le lit, que j’ai escaladé. Je m’y suis échouée avec la grâce d’une baleine sur le flan … Kim m’a demandé si je souhaitais me remettre dans la même position que dans la baignoire. J’ai acquiescé. Elle a sorti un grand cadre métallique qu’elle a fixé au lit, afin que je puisse me mettre accroupi en me tenant à l’armature. Mais il me paraissait si haut … je n’avais plus la force. Calée contre le dossier du lit qui était relevé, j’étais semi-assise, ce qui me permettait finalement d’être presque dans la même position que dans la baignoire. Je me sentais bien comme ça. Entre temps, une auxiliaire est arrivée. Il a également fallu me poser le cathéter. J’ai rapidement évoqué ma phobie des aiguilles. Je me souviens juste de la parole encourageante de l’auxiliaire, « Vous allez voir, ce n’est rien comparé à ce que vous êtes en train de faire, Maureen ! ». Sa voix était souriante et confiante. J’ai demandé s’il était possible de poser le cathéter à un endroit précis, là où je l’avais visualisé durant le travail que j’avais fait sur ma phobie. Très à l’écoute et bienveillante, la professionnelle m’a posé le cathéter là où je l’avais visualisé.
Après être sortie de la baignoire, et après la pose du cathéter, je n’ai plus souvenir d’avoir ressenti de poussées reflexes. Du moins, pas aussi puissantes (sûrement dû au fait d’avoir été coupé dans mon travail avec la sortie du bain et tout ce qui s’en ai suivi).
Dès que mes vocalises partaient dans les aigües, Baptiste me rappelait à l’ordre « Sons graves ! Sons graves ! »
Le moment de la naissance approchait … Le temps de poussée a duré environ vingt minutes. Durant tout ce temps, j’ai gardé les yeux fermés, pour m’aider à rester dans ma bulle. J’avais conscience de l’atmosphère et des places de chacun : Kim en face de moi, l’Auxiliaire à ma gauche, une main sur mon épaule et m’aidant à tenir ma cuisse, et mon chéri à ma droite, me tenant l’autre main et me caressant la nuque ou y posant la main quand je m’enroulais. La lumière était tamisée. Il était dans les 18h. J’ai beaucoup vocalisé. Dès que mes vocalises partaient dans les aigües, Baptiste me rappelait à l’ordre « Sons graves ! Sons graves ! », et je réajustais tout de suite mes vocalises. Lorsque la tête commença à sortir, Kim lança « Allez Maureen, je vois ses cheveux ! ». J’ai alors tout arrêté et j’ai dit « Elle a des cheveux ! Je vais pouvoir lui faire des couettes ! », ce qui a eu le mérite de faire rire tout le monde (ayant les cheveux très fins et peu fournis, je rêvais que ma fille puisse avoir une jolie chevelure et pouvoir la coiffer à loisir). Kim m’a proposé de toucher la tête du bébé. Je n’ai pas voulu. Non parce que je n’en avais pas envie, mais j’étais tellement concentrée et dans ma bulle que j’avais peur de perdre le fil. La tête sortie. Ce fut … sacrément puissant ! Kim m’encourageait, l’Auxiliaire aussi. Elles étaient douces et énergiques à la fois. Baptiste me parlait doucement, j’entendait sa voix dans le creux de mon oreille. Ce mélange de voix et la présence de Baptiste me boostaient. Ça tombait bien car je commençais à fatiguer. Kim me dit quelque chose comme « Allez Maureen ! Je finis à 19h, vous n’allez pas me laisser partir là-dessus ! ». J’ai demandé l’heure et l’Auxiliaire m’a dit sur un ton de confidence « Il est 18h30, vous êtes large ! ». Kim avait commencé sa garde avec moi, j’avoue que je n’avais pas envie non plus de la laisser partir sur ces entrefaites, je voulais faire cette rencontre en sa présence à elle, la sage-femme qui m’avait suivi avec bienveillance toute la journée.
Je me sentais en confiance avec elle, assez en confiance en sa présence, celle de l’auxiliaire et dans cette salle, dans cette atmosphère qui s’était créée, pour mettre mon bébé au monde. Alors je l’ai fait, j’ai continué mes efforts … Les épaules de ma fille sont sorties ! Ce fut encore plus puissant que pour sa tête, je ne m’y attendais pas. Et puis, son petit corps glissa de moi, Kim m’a interpelé pour que je vienne la chercher. Elle a guidé mes mains vers son corps. Elle était là, mon bébé, ce petit être que nous attendions, que nous couvions avec amour durant ces presque neuf mois ! J’étais sereine … A l’intérieur de moi c’était le désert le plus total, j’étais trop abasourdie par ce qui était en train de se passer. Il était 18h41 … Je l’ai découverte, ses joues toutes dodues, ses yeux grands ouverts, l’air si apaisée et détendue. Je me souviens avoir dit « Mon bébé… Mon bébé… », un peu comme si j’essayais de percuter que, oui, c’était là mon bébé. Je l’ai collé contre ma poitrine, j’étais sous le choc. Comme si je revenais à moi après une transe. Je crois que Baptiste était dans le même état que moi. Il m’a dit, tout fier et ému, qu’il était le premier à avoir croisé son regard, qu’elle l’avait fixé droit dans les yeux, d’un regard sans âge. Il le sentait, nous avions accueilli une grande âme, et à ce moment nous avons tous deux eu une même pensée que Baptiste fut le premier à formuler… Notre fille lui a rappelé ma tante, qui nous avait quitté au début de ma grossesse. Son visage rond, son nez en boule, son expression, son regard profond. Quelque chose nous a traversé à ce moment-là (pour y comprendre le sens, je vous invite d’ailleurs à lire « Les neuf marches : regard spirituel sur la grossesse et la naissance » de Anne et Daniel Meurois-Givaudan).
Sans pratiquer aucune manipulation, laissant notre fille venir et sortir par elle-même
Trop occupée à revenir de mon voyage et découvrir ma fille, je ne me suis pas aperçue de la suite. Baptiste m’a confirmé après qu’il avait coupé le cordon. Et quand je lui ai demandé il y a peu si notre fille avait été manipulé lors de sa sortie de mon périnée, il m’a dit que Kim avait laissé ces mains proches de sa tête sans la toucher et sans pratiquer aucune manipulation, laissant notre fille venir et sortir par elle-même. Ce qui signifie que nous avons vraiment été laissé libre et soutenue juste ce qu’il fallait dans cette mise au monde, comme j’en avais eu le désir.
L’Auxiliaire m’interpela tout sourire et me fit constater que j’avais perdu mon cathéter dans la houle de la délivrance (c’est d’ailleurs à cet instant que je mis un visage sur sa voix, ayant les yeux fermés tout au long de la délivrance). « Bon alors Maureen ! Pour la peine je vous mets seulement 9/10 pour avoir perdu le cathéter en cours de route ! ». On en a bien ri, et je lui ai confirmé qu’avec ce que je venais de faire, le cathéter c’était vraiment du pipi de chat ! Ni une, ni deux, elle le repositionna puis ce fut le moment de déclamer les prénoms et noms de notre fille, pour la déclaration de naissance et les fameux petits bracelets. À un moment, Kim me dit de ne pas m’inquiéter, que ce que j’allais sentir sortir était le placenta. Une fois celui-ci sorti, je me suis sentie très légère, tant physiquement que symboliquement. Comme si la boucle était bouclée.
J’ai vraiment vécu ce moment de la façon la plus respectueuse possible, avec un professionnel très agréable, bienveillant et doux.
Un médecin arriva dans la salle et parla avec Kim. Je l’entendis dire « Ah c’est bien t’as pas fait d’épisio ! », Kim répondit « Non, franchement quand je peux l’éviter je ne le fais pas. ». Il lui dit « Tu as bien raison, je préfère nettement une déchirure à une épisio. ». Suite à quoi, il s’avança vers moi pour se présenter. Il s’agissait d’un gynécologue obstétricien. Il m’expliqua que j’avais apparemment une petite déchirure. Il m’examina, et m’informa de tous ses gestes. Après examen il m’expliqua que j’avais quelques petites éraillures et une micro déchirure qui ne nécessitait que 2 petits points. Il prit le temps de m’expliquer ce qu’il se passait lors d’une épisio, la façon dont étaient sectionné les tissus et pourquoi il préférait que les tissus se déchirent d’eux-mêmes (quand cela arrive, les tissus se déchirent dans le sens des fibres et juste ce qu’il faut, tandis qu’une épisio vient sectionner les tissus sans tenir compte de leur enchevêtrement sur une longueur souvent plus conséquente.). Il m’averti des gestes qu’il allait pratiquer (la piqure pour anesthésier et lorsqu’il commença à coudre) et m’interrogea sur la musique qui passait. « C’est du Oum Kalthoum ça, non ? ». On échangea alors sur la musique, sur l’origine du choix des musiques orientales pour mon accouchement. J’ai vraiment vécu ce moment de la façon la plus respectueuse possible, avec un professionnel très agréable, bienveillant et doux.
Par la suite, nous avons passé deux heures dans cette salle, tous les trois. Nous avons averti mes parents et mes beaux-parents de l’arrivée de notre merveille. Nous avons fait connaissance. Puis une aide-soignante et une auxiliaire sont venues. L’auxiliaire guida Baptiste avec notre fille, pour l’habiller, puis il sorti de la salle quelques minutes avec elle, laissant une certaine intimité pour que l’aide-soignante puisse me faire une toilette et m’aider à m’habiller. Là encore, je me souviens avoir été accompagné par une professionnelle adorable et douce, avec qui j’ai d’ailleurs discuté tatouage tout au long de la toilette, étant toutes deux tatouées. Puis j’ai retrouvé mon bébé, et Baptiste nous a emmené dans notre chambre à l’aide d’un fauteuil roulant, guidé par l’auxiliaire. Nous avons traversé le couloir sous les yeux de patients qui attendaient leur rendez-vous. Nous avons reçu des regards attendris, des « Félicitations ! ». C’était si doux.
Rester à la maternité, recevoir des invités et des cadeaux !
Les papas ne pouvaient pas rester dans le cas des chambres doubles
Je suis restée à peine 3 jours à la maternité. J’ai accouché un mardi soir, et nous sommes rentrée le vendredi midi. La nuit suivant l’accouchement, j’étais en chambre double car toutes les chambres simples étaient prises. La deuxième maman arriva dans la nuit avec son bébé. Nous avons donc pu profiter de quelques instants seuls tous les trois. Puis Baptiste a dû rentrer. Les papas ne pouvaient pas rester dans le cas des chambres doubles. Nous étions tristes de nous quitter mais j’étais contente de profiter de ce moment seule avec Æmilia. La nuit se passa avec douceur. Il revint le lendemain matin et les visites n’ouvrant qu’à 15h, mes parents arrivèrent à ce moment. Du fait de la chambre double, nous avons fait les présentations dans un petit espace situé près de la réception du pôle maternité. Je n’avais toujours pas réalisé pleinement la situation mais ce fut très émouvant pour mes parents comme pour moi. Alors que j’étais entre de bonnes mains, Baptiste parti se mettre en quête de son repas. J’ai donc profité pleinement de cette première rencontre avec mes parents. Puis on m’appela à l’accueil car une chambre seule venait de se libérer. Sans réfléchir et pleinement en confiance, j’ai laissé mon bébé de quelques heures à mes parents pour aller déménager mes affaires. Mes beaux-parents arrivèrent entre temps. Nous avons pu tous nous installer dans la chambre au calme.
Mes parents et beaux-parents sont revenus le lendemain après-midi. Ma famille de Normandie est également venue pour l’occasion. Il y avait mon oncle, ma marraine et ses deux enfants (mon cousin et ma filleule, qui est également la marraine de notre fille). Ça faisait un joli petit comité dans la chambre. Mais j’étais ravie de partager ces moments avec ma famille. Pour les visites, nous avions seulement pensé à limiter aux grands-parents et à cette petite partie de ma famille Normande. Nous pensions organiser par la suite plusieurs petits temps de présentation une fois rentré chez nous, afin de recevoir famille et amis chacun son tour pour ne pas se sentir trop submergés.
Un matin, ma collègue ayant un rendez-vous à l’hôpital pour le suivi de sa deuxième grossesse, je lui ai glissé le numéro de ma chambre afin qu’elle puisse venir à notre rencontre. C’est un temps que j’ai vraiment apprécié. Et elle était contente de faire bisquer les collègues d’avoir été la première !
La balancelle quant à elle, a sauvé plusieurs de mes douches en journée
Nous avons reçu quelques cadeaux lors de ces visites à la maternité. Deux cadeaux qui nous furent très utile, bien que nous n’aurions pas pensé en avoir utilité de prime abord, furent un babyphone et une balancelle faisant de la musique et se balançant. En effet, il était rassurant de pouvoir observer que tout était ok lorsque nous couchions notre fille dans notre chambre le soir, pendant que nous étions dans le salon (et encore aujourd’hui, pour la sieste et la nuit dans sa chambre, mais plus pour vérifier qu’elle ne fait pas la rumba ou l’observer dormir). La balancelle quant à elle, a sauvé plusieurs de mes douches en journée ! Et certains de mes repas également (merci à la fonction bercement ! Æmilia avait un tel besoin de mouvement, et encore aujourd’hui. En même temps … elle a dansé dans mon ventre tout à long de la grossesse). Il y a aussi un cadeau qui m’a particulièrement touché. Un cadeau de ma mère. Une paire de boucles d’oreille, pour fêter cette nouvelle étape dans ma vie de femme, ce passage de fille à mère. J’étais très reconnaissante de sentir que l’on pensait à moi, que je comptais aussi… Pendant la grossesse, la mère est au centre de l’attention. A la naissance du bébé, elle passe souvent au second plan, derrière son bébé. Et pourtant, elle aussi a besoin de sentir qu’elle compte, qu’elle est importante, d’avoir de l’attention. C’est ce que j’ai ressenti en recevant ces boucles d’oreille (les mêmes que celles que j’avais été très triste de perdre quelques mois plus tôt, offertes par mes grands-parents, un joli clin d’œil).
J’ai également reçu un très joli cadeau de ma collègue. Une boite à souvenirs très originale fait main par une créatrice. Pour y mettre le bracelet de naissance, les photos des échographies, les premiers petits chaussons, la première mèche de cheveux, les dents de lait, un objet que nous souhaiterions transmettre à notre fille le jour de ses 18 ans, et pleins d’autres choses. Une très belle attention qui nous accompagnera tout au long des années.
Il m’a été difficile de faire le deuil de mon allaitement
Je n’avais aucune appréhension particulière concernant les soins et le maternage lors de mon séjour à la maternité. Je me questionnais sur comment faire le soin de cordon par exemple, mais plus parce que cela m’était totalement inconnu. Le seul moment où je me suis sentie plus hésitante fut le bain. J’étais aussi, je pense, plus déçue qu’autre chose, de vivre ce premier bain sans Baptiste (et à ce moment, je ne savais pas encore qu’il était possible de décliner le bain, notamment pour le vivre avec le papa). Ma fille m’a très vite rassuré … Je me suis laissé guider par elle et l’Auxiliaire présente. Æmilia était si paisible qu’elle m’a communiqué son calme et tout s’est passé de façon très sereine. D’ailleurs, nous étions quatre mamans, un ou deux papas avec nos bébés dans la salle de bain et j’avais le seul bébé qui ne pleurait pas et qui vivait les choses le plus posément du monde. En revanche, une fois de retour à la maison, je me sentais très angoissée à l’idée de baigner ma fille. Baptiste n’avait pas plus d’expérience et d’assurance et sentait mon angoisse. J’en ai parlé à ma mère, qui m’a proposé sa présence. Nous avons volontiers accepté. Encore peu sûre de moi, c’est Baptiste qui a baigné notre puce. Il était plutôt serein. Ma mère l’a vu et s’est mise en retrait pour nous laisser le privilège de ce moment.
Pour l’allaitement en revanche, j’ai accueilli avec plaisir le retour d’une auxiliaire lors de son passage dans la chambre. Cela faisait cinq heures que Æmilia dormait, entre l’accouchement la veille au soir et le bain du matin, elle était un peu assommée. L’Auxiliaire m’a guidé pour la mise au sein et aidé à améliorer ma position. L’allaitement était pour moi une évidence et Baptiste était tout à fait partant et prêt à me soutenir. Si j’avais pas mal lu et m’étais beaucoup renseignée sur l’accouchement et la naissance physiologique, je n’avais en revanche pas eu le temps de lire mon livre sur « L’allaitement naturelle » (de chez Mama Edition) ou d’aller à la pèche aux informations. Si au début, tout s’est plutôt bien passé, j’ai rencontré des problèmes de crevasses lorsque Æmilia eu un mois (ou devrais-je dire de cratères…). Malgré le soutien de la puéricultrice de la PMI, également conseillère en lactation, les conseils d’une cousine allaitante, le tire-lait et d’autres astuces, cela s’est progressivement soldé par un arrêt. Il m’a été difficile de faire le deuil de mon allaitement (et cela s’est ravivé lorsqu’à ses 18 mois, j’ai découvert un frein de lèvre, car j’ai compris d’où provenait nos difficultés, et j’avais aussi appris entre temps qu’il existe plusieurs types d’accompagnement et l’existence des conseillères IBCLC).
Le post-partum, un trimestre à part entière
Nous étions en colère et chamboulés par cette situation
En ce qui concerne mon post partum, j’ai vécu les tous débuts de celui-ci en demi-teinte. Lorsque j’étais à la maternité, Baptiste a été contacté par son employeur. C’était assez flou puis, il comprit que celui-ci lui demandait de reprendre le travail car il y avait eu un problème au niveau de sa demande de congé paternité. Au départ, il pensa qu’il lui faudrait juste aller à la boite pour régulariser sa demande, et peut être simplement bossé une journée. Il lui a été demandé de reprendre le vendredi, jour de notre sortie. Il a refusé en disant que nous rentrions ce jour de l’hôpital et a posé une journée sans solde. Nous étions en colère et chamboulés par cette situation. Nous étions néanmoins très reconnaissants que la sortie se fasse sur une veille de week-end. Nous avons savouré ces moments passé tous les trois. Le lundi matin, j’attendais des nouvelles de Baptiste avec impatience. Il m’a alors annoncé que sa demande de congé n’avait pas été validé officiellement du fait d’un problème logistique avec la secrétaire des Ressources Humaines, qu’il n’avait pas envoyé de courrier de demande de congé paternité en lettre recommandée. Cela ne lui avait pas été indiqué, et lui qui avait fait les démarches très en avance pour être sûr que tout soit ok … devait retourner bosser alors que sa fille venait de naître. Nous étions démoralisés. Je pleurais au téléphone, mon bébé dans les bras. J’ai appelé ma mère qui est venue me rejoindre. Peu à peu, les jours passant, nous nous sommes apaisés, mais le coup fut dur à encaisser. Nous profitions des retrouvailles le soir, et en journée, je profitais d’avoir Æmilia pour moi toute seule ou de voir mes parents. Hormis ce début difficile, j’ai vécu un post partum très doux, très cocon. Je me sentais épanouie et en forme, malgré les nuits un peu hachurées. J’appréhendais progressivement les changements physiques post accouchement.
Durant cette période, j’ai reçu deux fois la visite de ma sage-femme (celle qui m’avait accompagné pendant ma grossesse). Et comme déjà évoqué, j’ai pu rencontrer la puéricultrice de la PMI qui nous a accompagné dans un premier temps. Æmilia ayant du mal à prendre du poids, la Puéricultrice est venue chez nous pour les premières visites afin de vérifier la bonne progression de sa prise de poids. Puis j’y suis retournée une ou deux fois, avant de trouver une pédiatre pour prendre le relais du suivi.
En ce qui concerne la rééducation périnéale, j’ai suivi celle-ci avec ma sage-femme, qui proposait une rééducation via une sonde. Nous avons un peu parlé de rééducation abdominale mais nous n’avons jamais réellement mis en place d’exercices. Je me suis cependant beaucoup renseignée par la suite, et j’ai pu trouver au cours de mes recherches des vidéos sur youtube d’une coach sportive proposant des exercices de renforcement musculaire et rééducation abdominale adaptés et respectueux du périnée (adbo hypopressifs, pas de pressions sur le périnée, amélioration du gainage et du maintien), qui m’ont d’ailleurs beaucoup servis pour réadapter mes échauffements lors de mes cours de danse pour mes élèves.
Le plus beau révélateur et boosteur qui fut et qui soit !
J’ai repris mes cours de danse à la fin de mon congé maternité. Etant donné que je dispensais ceux-ci une fois par semaine en soirée, mon compagnon était présent pour s’occuper de notre puce. J’ai eu beaucoup de mal à la laisser au départ. Mais dès que j’étais avec mes élèves, je retrouvais ma pêche et j’étais ravie de pouvoir retrouver la danse. En dehors de mes cours de danse, je n’ai eu aucun besoin de chercher un mode d’accueil, puisque j’étais au chômage. Il y a bien eu cette fois, à la fin de mon congé mater où j’ai postulé pour un post que je convoitais quelque temps auparavant. Mais en réalité, depuis que j’avais ma fille, rien ne me faisait plus envie que d’être auprès d’elle. Le reste me paraissait fade. J’ai toujours dit à Baptiste que je ne voulais pas faire un enfant pour le confier aux autres, que si nous avions la possibilité, je souhaitais pouvoir m’occuper de nos enfants. Le destin m’avait un peu écouté puisque, alors que j’étais enceinte, je n’avais pas été renouvelé au bout de 4 ans de CDD dans la structure où je bossais du fait de ma grossesse, me donnant droit au chômage à la suite de mon congé. Cela me permettait de rester avec Æmilia, le temps de trouver quel chemin professionnel je souhaitais prendre. Aujourd’hui encore, je continue à m’occuper d’elle, la confiant à mes parents lors de mes rendez-vous et ateliers.
J’ai monté il y a peu mon auto-entreprise. Grâce à ma fille, grâce à ma grossesse, mon accouchement, mes rencontres, mon parcours, j’accompagne aujourd’hui des futurs et nouveaux parents, des bébés et bambins, dans leur cheminement, souhaitant leur permettre de trouver leurs clés et révéler leur potentiel. Je suis monitrice de portage, Educatrice de Jeunes Enfants en libérale et future doula… Merci la vie, merci ma fille de t’être nichée au creux de moi, au creux de ma vie il y a maintenant deux ans. Le plus beau révélateur et boosteur qui fut et qui soit !
Merci Maureen pour ton expérience, tu es précieuse, prend soin de toi et d’Æmilia <3